Saturday 14 May 2016

Entendez vous la cavalcade s'approcher?

Commençons par un tour en Allemagne:
L'Allemagne mène sur son marché intérieur une politique de relance modérée par la consommation: création d'un salaire minimum, accords salariaux de branche augmentant fortement ceux ci, primes exceptionnelles.
Résultat: l'Allemagne a vu sa croissance bondir a +0,7%. Le chômage continue de se réduire.

La plupart des mesures de "l'agenda 2010" mises en œuvre par Schröder entre 2003 et 2005 ont été depuis de nouveau supprimées. Je renvoie à ce sujet à un excellent article, légèrement ironique, de Thomas Fricke dans le Spiegel.
Il ne reste qu'une mesure emblématique, la suppression des allocations chômage aux chômeurs de longue durée pour "ne pas financer oisiveté et paresse".
Résultat: le chômage de longue durée dans le chômage global reste exactement au même niveau qu'avant cette mesure: un chômeur de longue durée n'a pas choisi d'être chômeur, la preuve empirique de la stupidité théorique de Jean Tirole est apportée tous les jours.

Point interessant: si le ministre des finances allemand peut présenter des comptes publics en équilibre, ce n'est pas pour avoir réduit les dépenses, mais grâce à l'augmentation des recettes dues à la croissance et l'emploi.
Cette politique de relance par la consommation est soutenue par la politique de faible taux de la BCE, par la déflation importée due à la baisse des prix du pétrole et se conjugue pour favoriser une reprise forte de l'investissement des entreprises.

En France, on assiste à un frémissement de la conjoncture et une reprise de l'emploi.
On connais les composantes de cette croissance: c'est comme en Allemagne la reprise de la consommation qui mets en route un cercle vertueux, où les entreprises, surtout les PME, face aux carnets de commande qui se remplissent, reprennent investissement et embauche.
Tous les chiffres de 2015 montrent que c'est bien la reprise de la consommation qui préexiste au retour de la croissance, de l'investissement et de l'emploi.

Cette évolution positive a donc lieu en dépit des réformes et des mesures du gouvernement.
C'est comme pour Schröder: l'agenda 2010 a retardé la reprise allemande de 4 ans, et lorsque celle ci est venue, elle n'a profité qu'à une minorité d'allemands.
La classe moyenne n'en a pas profité, celle ci diminuant sur la période de près de 10 points. Aujourd'hui un allemand sur deux est de la classe moyenne. Ils étaient presque deux sur trois il y a 20 ans.
La pauvreté et la misère sociale ont augmenté.
Le taux de pauvreté en Allemagne est supérieur à la France, supérieur à il y a 15 ans.

C'est exactement ce que le gouvernement Valls prépare à la France: la liquidation de la classe moyenne et l'aggravation des inégalités, l'approfondissement de cette fracture sociale identifiée depuis 20 ans.
Les lois ANI, Macron et El Khomri auront un impact sur l'emploi: le même que celui des minijobs Schröder - depuis supprimés - ou celui des contrats zéro heure britanniques.
La reprise sera très inégalement distribuée, avec une majorité de citoyens perdant sécurité, niveau de prospérité et qualité de vie.

Alors, le gouvernement pourra dire à coups d'indice macro-économiques "la France va mieux" et en tirer tous les bénéfices à soi.
C'est le mensonge habituel du politicien péripatéticien.

La réalité est terrible.

Après avoir retardé le retour de la croissance, qui aurait pu venir très forte des 2013 et un plan de relance adéquat, par pur aveuglement idéologique, et gaspillé 43 milliards à l'impact faible sur l'investissement et l'emploi, ce gouvernement a créé les conditions pour une prospérité pour les plus riches, socialement, culturellement, en capital financier, et pour une société de plus en plus violente, impitoyable et inhumaine.

Tant en Grande Bretagne, en Hollande, en Allemagne, dans les pays nordiques de la flexisecurite, en Autriche où le chômage est à 5% mais le taux de pauvreté est depuis dix ans stable, malgré croissance et plein emploi, à un autrichien sur 8, on voit le résultat de ces sociétés violentes: la progression des partis d'extrême droite.

La France n'est pas à la traîne de l'Europe. Elle fut, avec Chirac-Juppe, puis avec Chirac et Sarkozy, précurseur dans ce mouvement. On peut trouver des 1993 les traces de cette marche forcée.
Il y eut une parenthèse de trois ans, les trois premières du gouvernement Jospin.
Elles coïncident, ces années Jospin, avec les années de plus fortes croissance et de plus forte baisse du chômage des dernières 25 années. Mais cette parenthèse, où des erreurs furent commises, certes, est un grand tabou.

La France est précurseur tant dans le décrochement progressif de la classe moyenne que dans la montée de l'extrême droite. Car le corps social français est sensible, et réagit vite et fort, là où des sociétés plus consensuelles ont absorbé bien des chocs avant de sombrer dans le désespoir brun.

La politique actuelle, en accentuant cette violence sociale et cette inégalité dans le partage de la prospérité, accentue les raisons de voter Front National.

L'Assemblee Nationale de 2017 pourrait bien ressembler aux Conseils Régionaux du Nord et du Sud-Est.
Ce sera le bilan politique terrible de ce gouvernement.

Bien plus terrible cependant sera son héritage social. Le gouvernement Valls prépare la surmortalité des couches populaires, les angoisses et le sur-suicide, le recul de la santé publique face aux maladies de la pauvreté.

Hollande, Valls, Macron, Sapin, les quatre cavaliers de l'apocalypse sociale.

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